lundi 28 janvier 2008

ORIGINE des DECISIONS

III - Origine des décisions

En matière d’urbanisme les décisions sont lourdes de conséquences car elles engagent le très long terme.

On le comprend bien, il est, dans ces conditions, de bonne politique, pour une collectivité, de prendre le temps nécessaire à une concertation aussi large que possible, puis à une réflexion longue et approfondie.

Un hôtel dans le lotissement des mazots, un autre projeté aux fermes de Pralong,
deux autres prévus au jardin Alpin, sans compter celui envisagé à proximité du golf, cela ne remet-il pas en cause l'urbanisme aéré et spacieux de Courchevel ?

Mais la vrai question est l'origine de ces décisions sont-elles engagées dans le cadre d'un plan, d'un programme patiemment élaboré ? Ou le sont-elles pour répondre à la proposition alléchante d'un promoteur, présence aussi éphémère que lucrative ?

Non ces décisions ne peuvent et ne doivent être générées que par une volonté de la collectivité inscrite dans un plan de développement à long terme.

Puis il est impératif sur un projet, faisant l'objet d'un cahier des charges précis, de mettre en concurrence pour s'assurer d'avoir le meilleur projet possible et de rejeter fermement tout accord de gré à gré.

Un exemple frappant des résultats désastreux du non respect de ces principes est le développement du quartier de l'ancienne poste.

Sur ce dossier précis , au moment du projet, j'avais remis au maire, en mains propres, une note de suggestions : appel d'offre architecture, consultation sur le bien fondé du déplacement de l'office du tourisme, réflexion sur les questions de parking, appel d'offre pour la réalisation…….

Rien de tout cela ne fut fait et l'on voit aujourd'hui les résultats désastreux : isolement des bureaux de l'O.T., désordre de stationnement et embouteillages malgré l'embauche de nombreux policiers municipaux, constructions scandaleuses devant le presbytère.

Et le promoteur, bénéfices fait….. habite ailleurs.

dimanche 27 janvier 2008

LA CONCERTATION


II - LA CONCERTATION



Les évolutions en cours dans tous les domaines, particulièrement l’urbanisme, sont si importantes et rapides qu’il ne s’agit plus d’une évolution mais d’une véritable révolution.

Ces dispositions qui bouleversent en profondeur l'avenir de Courchevel devraient, à l'évidence, faire l'objet d'une réflexion approfondie suivant une large concertation avec l'ensemble des parties prenantes de la commune.

Or tel n'est pas le cas.
J'en trouve un exemple édifiant dans le procès verbal de l'AG du syndicat hôtelier :

"…Réel besoin d'harmoniser et de diversifier le parc hôtelier : réflexion sur les lits hôteliers, leur nombre, leur qualité ?…………"

Tels sont les questions, entre autres, que se posent les hôteliers. N’aurait-il pas été sage, de se concerter avec la profession avant d'autoriser tant de projets nouveaux ?

Le syndicat hôtelier soulève également la question de la mixité :

" Clientèle trop élitiste qui ne fait pas vivre la station à certaines heures de la journée…
Le luxe affiché de Courchevel effraie la clientèle moyenne gamme qui a tendance à se diriger vers d'autres stations.
La station a besoin de faire exister une mixité entre une clientèle de haut de gamme, intermédiaire et la population locale……."

Et le syndicat hôtelier me rejoint sur la nécessaire concertation :

"L'extension hôtelière et le développement à outrance de la construction sont-ils opportuns ?
"Importance d'ouvrir une discussion publique avec la mairie pour réfléchir sur le devenir de la station"


Ces mêmes questions se posent dans bien d'autres domaines.

jeudi 17 janvier 2008

L'homme, L'argent, et le bonheur

I - L’homme l’argent et le bonheur

Perplexe, oui perplexe, c'est le mot qui me vient à l'esprit devant tous les chantiers qui se poursuivent ou s'ouvrent à tous les niveaux de Courchevel à l'aube de cet hiver 2008.

Au monde de l'argent Courchevel est à la mode.
Il ne faut pas bouder son plaisir, je ne le ferai pas, ayant présidé au quart des soixante ans de vie que vient de fêter Courchevel, consacrant, durant ce long bail, toute mon énergie à son succès.

Mais venez, asseyons nous cinq minutes et réfléchissons aux raisons de ce succès.

Il y a bien sûr le site diversifié et magnifiquement adapté au ski,

Le plan d'urbanisme unique, donnant à chaque bâtiment l'accès à la route, d'un coté et de l'autre aux pistes de ski,

Le domaine skiable, sa conception et son entretien,

La nature partout, pénétrant les stations elles-mêmes.

Mais le facteur, à mes yeux, le plus important fut la qualité de l'accueil que réservèrent les
Saint Bonnais aux touristes, ces nouveaux habitants saisonniers.

Ils le leur rendirent bien, liant de solides amitiés, s'attachant au pays qu'ils firent leur, apportant, leur compétence au développement de la collectivité.

Comme les Saint Bonnais de souche ils s'attachèrent à cette vallée, pour certains s'y installèrent et devinrent entrepreneur, électeurs et même membre du conseil Municipal ou des organismes réfléchissant et conduisant la politique de la commune.

Quelques uns y gagnèrent de l'Argent, parfois beaucoup d'argent, mais ce n'était pas leur "tout".

Leur raison de vivre c'était l'amour partagé des villages et des montagnes de la vallée. C'est cela qui forme une collectivité vivante et heureuse.

Temps révolus me direz vous !
Je ne le crois pas, au contraire, temps à venir, ici comme ailleurs, l'homme ne peut vivre heureux sans appartenir à une collectivité. Et le temps de "l'argent roi" passera.

J’ai vu ces derniers temps trop d’amis de Courchevel vendre et partir.
Il y a l’âge, me direz-vous, c’est vrai une génération se retire.
Et le goût de la bonne affaire, c’est aussi exact.

Mais il y a aussi et surtout cette radicale modification de l’état d’esprit, l’argent est devenu si prioritaire que l’homme ne s’y retrouve plus. L’on ne vient plus seulement à Courchevel pour s’y retrouver entre amis, mais aussi pour y faire des affaires.

mardi 15 janvier 2008

Journal de Campagne

Michel, pourquoi t’engager dans cette campagne ?

Et bien pour trois raisons :


I. Pas de démocratie sans élections, et pas de bonnes élections sans débats, il convient que les candidats s’expliquent sur leurs projets.

Le débat est nécessaire, je veux contribuer à l’animer.

II. Des questions de fond se posent :

- Nous sommes nombreux à ne pas voir la ligne conductrice, le projet, qui relie les importantes décisions apparaissants jours après jours.
- Pourquoi tant de nouveaux hôtels et chalets ?
- Pourquoi, soudain, toutes ces cessions de patrimoine ?

III. Il y a aussi des questions de formes :

- Absence de concertation avec les parties prenantes.
- Développement important du personnel municipal administratif, faisant craindre des difficultés pour les budgets à venir.
- Absence d'appel d'offre.

De tout cela il faut débattre, maintenant.

Alors je vais, dans un premier temps formuler quelques pistes de réflexion, puis avancer des idées conductrices pour un « PROJET »

vendredi 11 janvier 2008

Lettre ouverte au Maire



Lettre Ouverte à Gilbert Blanc Tailleur
Maire de SAINT Bon Courchevel

Monsieur le Maire, Cher Gilbert,

La période électorale est un temps de dialogue et mon propos aujourd’hui est bien de participer à cette réflexion

Nous sommes les spectateurs de profondes et rapides évolutions dans bien des domaines sans distinguer une cohérence, sans avoir été, tous, invités à une réflexion sur notre destin.

Les questions qui se posent sont de fond et de forme les deux étant d’ailleurs liés.

Lorsque j’ai vu se construire à moins d’un mètre de la cure de 1850 des appartements dans un quartier qui n’en comportait pas ce qui impliqua la mise en place d’abris poubelles à l’entrée de l’église, devant la statue de la Sainte Vierge,

Lorsque j’ai appris la décision de vendre les fermes de PRALONG, mémoire de l’activité ancestrale de Saint Bon,

Lorsque j’ai vu de vastes et brutales déforestations dans le quartier des mazots et des Chenus,

J’ai été profondément bouleversé pensant que l’on touchait inconsidérément à l’essentiel, au cœur de ce à quoi nous sommes profondément attaché et qui fonde notre avenir.

Le sacré ne tient pas qu’au religieux. Est sacré ce que l’on ne peut ni vendre ni donner mais qu’il faut garder pour le transmettre en tant que support essentiel d’identités que l’on désire voir survivre au cours du temps.

Nous avons deux biens essentiels qu’il nous faut préserver, ils sont à l’origine du succès de Courchevel et les meilleurs garants de son avenir, c’et la tradition séculaire de montagnards de la collectivité de Saint Bon et notre site de montagne.

J’y reviendrai.

A SUIVRE : I- L’homme l’Argent et le bonheur – II- La Concertation – III- Origine des décisions – IV Mémoire de la vie Alpestre et rurale – V- Quel budget pour demain ? – VI- l’été – VII la vie permanente au cœur du Val Vanoise.- VIII –Changer notre image

VOTRE AVIS M’INTERESSE
BLOG : http//ziegler-courchevel-2008.blogspot.com
Michel.ziegler@wanadoo.fr

jeudi 10 janvier 2008

Remise des insignes
d'Officier de la Légion d'Honneur

1er juillet 2005

Hervé GAYMARD – Michel ZIEGLER





Nous voilà tous réunis aujourd’hui pour saluer la vie d’un homme au parcours exceptionnel, tour à tour pilote, guide de montagne, ancien maire, chef d’entreprise … Un homme vivant, pour reprendre l’expression de Georges Bernanos, et ils ne courent pas les rues.
Michel, tu es un homme aux mille facettes et l’exercice auquel je dois me livrer ce soir est certainement aussi périlleux que l’aviation : en effet, toutes les personnes que tu as réunies autour de toi ne pourront me contredire si je dis qu’il n’est pas facile de tirer l’essence de cette vie extraordinaire, une vie remplie d’évènements plus enrichissants les uns que les autres. D’autant que nous nous connaissons depuis seulement 12 ans et que c’est un véritable honneur que tu me fais en me demandant d’être ton parrain.

L’histoire de Michel est avant tout celle d’un passionné de la vie, passionné de la France, passionné de l’aéronautique et de la montagne. Fondateur de la compagnie Air Alpes, tu t’es toujours battu sans relâche pour concrétiser tes rêves ….même les plus farfelus.. Ainsi avais-tu imaginé lors de la création de cette compagnie en 1961 de pouvoir poser des guides de montagne et leurs clients sur des glaciers, comme par exemple sur le dôme du goûter au Mont-blanc, pour qu’ils puissent redescendre ensuite à skis.

D’un altiport de fortune, fait de bric et de broc, sans local propre, où ta femme Martine cuisinait pour l’équipage avec un camping-gaz, et où les pilotes venaient travailler en peaux de phoque, naîtra une compagnie aérienne qui transportera des gens de toutes nationalités et de tous horizons. Ainsi les clients pouvaient-ils acheter un billet Tokyo - Courchevel, ou New York - Meribel, et on trouvait même à cette époque des douaniers sur l’altiport de Courchevel.
Pour faire venir les clients des Etats-Unis tu avais trouvé un slogan ingénieux qui tient en une phrase : « il est moins cher et moins loin pour un américain de la côte Est de rejoindre Courchevel que d’aller dans les Rocheuses ». En outre, cette compagnie aérienne eut une couverture presse inimaginable notamment grâce aux connaissances journalistiques de Gilles de la Rocque. Air Alpes fit ainsi la première page du New York Herald Tribune.
Cette station connut alors son âge d’or et on pourrait même dire qu’elle était devenue le pendant montagnard de Saint-Tropez avec ses stars : Alain Delon, Catherine Deneuve, Brigitte Bardot, et ses personnalités : le premier ministre du Canada ou Valéry Giscard D’estaing. Ils pouvaient voler indifféremment sur les Piper Super-Cub, les Pilatus-Astazou ou les Twin-Otter pour venir skier dans nos stations. Certains pilotes se rappellent même avec nostalgie cette période où Farah Pahlavi, la femme du Shah d’Iran que l’on surnommait la « Chabanou » leur donnait des écus d’or en guise de pourboire.

Au delà des paillettes, je crois que de nombreux anciens d’Air Alpes te sont extrêmement reconnaissants pour ce que tu leur as apporté sur le plan personnel et professionnel.
Ainsi de nombreux pilotes privés ont-ils pu grâce à l’aventure d’Air Alpes et la création de la ligne régional Chambéry/Paris, devenir des pilotes professionnels pour de grandes compagnies aériennes, je ne citerai qu’un exemple pour illustrer ce propos, celui d’Anne-Marie Peltier, qui non contente d’être la première femme pilote d’Air Alpes, fut par la suite l’une des premières femmes commandant de Bord à Air Inter.

La reprise d’Air Alpes en 1981 par le groupe TAT marquera la fin de cette époque pionnière de l’aviation régionale, mais tu ne tardas pas à faire profiter de ton expérience d’autres compagnies en devenant président d’Air Martinique de 1983 à 1993, puis d’Aigle Azur de 1993 à 2001.

Le virus de l’aviation c’est ton père ingénieur et pilote d’essais, puis directeur général d’Air France qui te l’a transmis dès ton plus jeune âge. Il t’a d’ailleurs soutenu et accompagné tout au long de ta vie notamment en devenant co-fondateur d’Air Alpes.
A l’heure où tous les regards convergent vers l’A 380 -nous l’avons vu lors du salon du Bourget 2005- il convient de rappeler qu’ Henri Ziegler fut le père français d’Airbus mais aussi du Concorde.

Celui qu’on appelait « Monsieur Concorde » fut le premier à imaginer une collaboration entre différents pays autour de projets aéronautiques. L’opiniâtreté de ton père fut décisive pour conduire l’Europe à voler de ses propres ailes.
Tu es le digne successeur de ton père que tu as tant admiré mais aussi de ta mère…. en effet tes parents furent tous les deux distingués pour leur travail de l’ombre. On m’a d’ailleurs raconté que tu avais assisté aux côtés de tes frères et sœurs, à leurs retrouvailles à la fin de la guerre dans une scène émouvante où vous avez eu du mal à reconnaître ton père qui portait l’uniforme de l’armée américaine.

Pardonnes moi cette digression autobiographique sur tes parents, néanmoins je sais que tu ne m’en tiendras pas rigueur toi pour qui la famille occupe une place si importante dans ta vie. La famille Ziegler forme une véritable tribu où ceux qui y appartiennent sont liés par un sens du partage, de la solidarité et de la foi, indéfinissables.

Je crois que tu as compris mieux que quiconque la force et la richesse qu’elle représente. En effet, tu mesures l’importance d’être entouré par les gens que tu aimes à chaque étape de ta vie, dans les moments heureux ou plus difficiles.

Et quand la maladie a commencé à affaiblir ton épouse Martine, tu n’hésiteras pas à stopper toute activité pour partir avec elle dans votre maison de Lasseube au cœur des Pyrénées. Tu es alors resté sans relâche à son chevet, en te consacrant entièrement à Martine, en lui tenant la main jusqu'au bout.

Martine était ta boussole de vie et tu cultivais à ses côtés le sens de la famille, de l’amitié, et tes enfants, petits-enfants et amis, rassemblés ce soir autour de toi en témoignent.
Il y a des inconditionnels et je ne les énumérerai pas tous, citons seulement son éminence le Cardinal Etchegarray, qui vient te rendre visite chaque année, dès que son emploi du temps d’envoyé du Pape pour la paix et la justice dans le monde, le lui permet.

Pionner et visionnaire, c’est ta capacité à t’émerveiller encore de tout qui t’a permis de réaliser de grandes choses.

Dans un passage du film relatant l’histoire d’Air Alpes tu l’exprimes d’ailleurs bien « J’aime emmener des enfants en avion, si ils sont un peu excités au départ quelques virages les calment aussitôt, ensuite ils regardent sans êtres blasés, sans se lasser et au fond je suis un peu comme eux je regarde inlassablement ces montagnes, ce monde dans lequel je vole ».
Ah la montagne…ton second amour ! Les montagnes sont pour toi un refuge, une source d’inspiration mais aussi un métier puisque tu as réussi un examen des plus exigent : celui de guides en 1967.

Tu apprécies la montagne pour son côté sportif, est-il besoin de rappeler que tu as gravi de hauts sommets dans le monde - mais aussi pour ce qu’elle t’apporte du point de vue personnel. En effet, le débat s’élève avec l’altitude et l’on peut considérer l’existence d’une façon différente. Un proverbe tibétain dit à ce propos « quand tu arrives au sommet de la montagne, continues de grimper ». Effectivement, il est important de vouloir toujours aller plus haut, et je pense que c’est ce que tu as fait tout au long de ta vie, Michel. Tu as toujours essayé de voir au delà des obstacles, ce qu’il y avait de positif. Tu as cette faculté que possèdent les Grands de te relever quoiqu’il arrive et c’est bien là que réside ta force de caractère.

Avant de te décorer officiellement j’aimerais te lire une phrase qu’à prononcé Mr Xavier Chappaz, président de la compagnie des guides de Chamonix, lors de l’hommage rendu à un homme que tu connaissais bien et qui a eu une existence aussi riche que la tienne, je veux parler de Roger Frison Roche :

« Partir, revenir, ouvrir les portes de la vallée, s’en aller loin voir d’autres choses et d’autres gens et puis s’en retourner au pied de ses montagnes pour les contempler de nouveau, le regard modifié de toutes les expériences, voilà l’enseignement d’une vie ». Je crois que cette phrase succincte décrit parfaitement ta vie, toi qui as toujours voulu découvrir ce qu’il y avait derrière les montagnes d’ici ou d’ailleurs, mais qui dans le même temps a toujours eu besoin de te ressourcer au pied de ces mêmes montagnes en Savoie.

Pour ta carrière exceptionnelle, Michel ;
Au nom du Président de la République et en vertu des pouvoirs qui nous sont conférés,Je te fais Officier dans l’Ordre National de la Légion d’Honneur.


Monsieur le Président du Conseil Général,

Il y a quelque temps j'avais exprimé, auprès de votre prédécesseur le souhait de voir reconnus, un jour, en Savoie, les évènements qui nous réunissent aujourd'hui : La création puis l'évolution d'Air Alpes, c'est-à-dire d'une page, fut-elle modeste, de l'histoire de l'aviation civile française et de la desserte de la Savoie.
Ceux qui l'ont écrite, Cadres et Employés, Mécaniciens, Pilotes, Conseiller Généraux, Maires et, bien sûr, mes frères Guides sont représentés ici et c'est de leur part que je vous remercie de nous ouvrir ces prestigieux salons chargés d'Histoire.

Merci Monsieur le Président.


Monsieur le Ministre, Mon cher Hervé,

A toi aussi, merci d'avoir accepté de nous remettre cette éminente distinction.

Je te l'ai demandé pour les valeurs que nous partageons : La Foi, épine dorsale de notre vie, l'amour du Pays, la Savoie, la France et l'Europe, la fidélité de ton amitié aux jours des épreuves et ma confiance dans tes éminentes qualités pour contribuer au redressement de la France et à la construction de l'Europe. Il y faudra aujourd'hui, aussi beaucoup de courage.

J'ai été sensible à l'évocation des qualités que tu as bien voulu me reconnaître, et n'était-ce le jugement réaliste que je porte sur moi, je pourrais en tirer quelque vanité, mais, et, je vais dire un lieu commun, je ne suis ici que le porte drapeau d'une action collective.

Comme la fourragère que les hommes de mon régiment, le 6ème BCA, portaient en mémoire de son action héroïque à Narvik, cette éminente distinction est dédiée à une action collective ou chacun prit sa part.

Sur cette question une seule idée me préoccupe; Ayant beaucoup reçu de mon pays, de parents magnifiques, de nombreux éducateurs, et de l'Eglise, ma maison, c'est d'avoir bien fait fructifier les talents qui m'ont été confié.

Retracer aujourd'hui devant vous l'histoire d'Air Alpes allongerait trop mon propos. Elle est faite de bagarres contre le conformisme et les idées reçues, de magnifiques succès et de beaucoup d'échecs.

Je me suis attelé, avec l'aide de la FACIM, à écrire cette aventure. Alors, aujourd'hui, je voudrais seulement évoquer quelques hommes et évènements.

En février 1961 Robert Merloz et moi faisons nos premières armes de pilote à l'aéroclub Air France, le 18 février nous louons pour deux jours un SAAB SAFIR, petit monomoteur de tourisme et rejoignons Chambéry via Bron. Passant au travers de la dent du chat nous sommes impressionnés par ce qui parait être, pour nous aviateurs des plaines, l'étroitesse du site et c'est avec précaution que nous descendons en spirale vers un aéroport dont, à l'époque, l'essentiel de l'activité est militaire.

Quelques années plus tard, après que nous ayons, une nuit d'orage, posé un Beech 99 et ses quinze passagers dans les roseaux entre lac et piste un ILS, système de guidage radio électrique à l'approche, sera installé permettant l'atterrissage en sécurité d'avion de plus en plus importants.

C'est au retour de ce voyage du 18 février que nous décidons d'installer le siège d'Air Alpes, en cours de création, dans la petite aérogare vide. Monsieur MARTINOT patron de la CADAF travaille dans l'ancien hangar à la fabrication de pièces d'avions il se passionnera pour notre jeune compagnie et assurera l'entretien de notre premier avion. Il restera jusqu'au bout un fidèle et amical compagnon.

En juillet 1961 nous louons au constructeur un premier PILATUS PORTER, équipé d'un moteur à pistons, Robert et moi le crasherons au décollage du Dôme du Gouter le 2 septembre. Ce qui nous amènera à commander le premier Pilatus TURBO PORTER équipé d'une Turbine TURBOMECA ASTAZOU, merveilleux avion avec lequel nous ferons des milliers de déposes sur glacier et les premières liaisons entre les Altiports et les grands aéroports régionaux. Nous en exploiterons jusqu'à sept.

De tous les sites sur lesquels nous nous sommes posés le plus spectaculaire est le Dôme du GOUTER, 400 mètres sous le sommet du Mont Blanc , tourné vers l'EST il est touché par les tous premiers rayons de soleil ce qui nous permettait, émergeant de la pénombre du FAYET de nous y poser à la pointe du jour. C'était une grâce extraordinaire. Puis de toute notre habileté nous replongions vers la pénombre pour reprendre d'autres compagnons et rebondir vers la lumière et la gloire de ces sommets que nous avons toujours chéris de toute notre âme.

Le Pilatus comporte 8 sièges Un pour le pilote, six pour les skieurs que nous déposions et un, à coté du pilote pour le guide. Rapidement se forma autour d'Air Alpes une équipe de guides, ils aidaient à embarquer et débarquer, assuraient la sécurité des passagers autour de l'avion, aidaient l'avion à tourner sur la neige, beaucoup des plus passionnés devinrent de véritables copilote donnant leur avis sur l'approche et l'atterrissage quand les conditions étaient difficiles. Ils furent des membres à part entière de la fratrie que nous formions.

Deux d'entre eux devinrent pilote, Dédé DIARD et le grand Raymond Lambert.

Ils proposaient de nouveaux sites quelquefois extrêmes. Nous partagions notre amour pour le ciel et la montagne et je garde au plus chaud de mon cœur la mémoire de ceux qui nous ont quitté, Dédé SIMOND, Robert BLANC, Serge SENTI, Yves POLLET VILLARD, André TOURNIER, Gérard DEVOUASSOUX, bien sure Dédé DIARD et LAMBERT….et tant d'autres que je ne peux citer.

Robert et moi étions deux fort jeunes gens et notre idée de construire des pistes en pente en montagne était certainement jugée comme farfelue par les responsables de l'Aviation Civile eh bien ! Honneur aux maires, de la Gontrie, Ancenay, Borgey et à leurs équipes qui nous ont fait confiance et ont construit les premières pistes à Meribel et Courchevel.

Et honneur aussi à l'aviation civile qui nous fit accompagner par deux pilotes Marcel Collot et Jean Delparte, ils homologuaient les pistes que nous ouvrions.

C'est à Méribel, le 30 janvier 1962 que fut inventé par Joseph SZYDLOWSKI, président de TURBOMECA, le mot ALTIPORT.

Au fil des années beaucoup de stations suivirent et les pistes sommaires du début furent, pour certaines, progressivement améliorées.

C'est le besoin d'activité l'été pour nos Pilatus qui nous conduisit à créer des lignes à l'intérieur de la Corse, en particulier vers Propriano et Figari que nous ouvrîmes, à nous intéresser à la lutte contre la grêle pour protéger les cultures sensibles, vigne, tabac et à remorquer sur les plages d'immenses banderoles.

En 1968 le Président FONTANET me convoqua pour me dire qu'il souhaitait nous voir participer au désenclavement de la SAVOIE, je lui indiquais que le travail aérien que nous faisions n'avait rien à voir avec l'exploitation d'une ligne régulière. Il me répliqua : Nous allons vous aider et allez voir, de ma part, l'Amiral HEBRARD, Président d'AIR INTER, c'est lui qui m'a suggéré de m'adresser à vous et il va vous aider.

Le début de la liaison entre Chambéry et Paris fut quelque peu folklorique, nous exploitions un avion "beechcraft "Marquis" de six places vers Lyon Bron où nous donnions la correspondance avec les Viscount d'Air Inter sur Paris.

Ne disposant pas de moyens de radio guidage, nos irrégularités étaient fréquentes et cette liaison indirecte était peu commode.

Nous nous sommes donc lancé dans l'exploitation d'une ligne directe vers le Bourget, dans un premier temps avec un Twinn-Otter de 20 places, sympathique mais bien lent, puis nous avons mis en service le BEECH 99 de quinze places beaucoup plus rapide et efficace, Cet avion constitua durant des années la base de notre flotte régionale, tous les passagers de l'époque s'en rappellerons avec émotion.
La France toujours très centralisée avait besoin de liaisons transversales et le gouvernement, par le travers de la DATAR, à l'époque dirigée par Gérôme MONOD, nous soutint financièrement pour le lancement de toute nouvelle ligne transversale.

En 1970, fort de notre première expérience Corse, nous avons ouvert Chambéry/Grenoble/Ajaccio et Bastia.

En 1970 également, Air Alpes prend l'initiative de regrouper toutes les initiatives naissantes dans un syndicat professionnel l'ATAR.

Puis de créer un GIE commun de services à Paris, pour toutes ces entreprises provinciales, le GIECAR.

L'ATAR mènera d'importantes négociations avec Air France pour conclure des accords généraux de coopération et contribuera à une profonde évolution des brevets et licences du Personnel Navigant

Chambéry devient une plateforme très active avec jusqu'à huit rotations quotidiennes sur Paris et deux rotations quotidiennes vers Grenoble/Saint Etienne/Toulouse et Grenoble/Marseille/Nice

Puis viendra l'intensification de la desserte de la Corse avec l'ouverture de plusieurs liaison directe vers Figari/Sud Corse et vers les quatre aéroports Corse depuis Toulon.

Pendant toute cette période l'activité Pilatus d'été s'intensifie, à la lutte contre la grêle s'ajoute la participation à des opérations de lutte contre les incendies de forêt.

En 1971 Air Alpes signa un contrat pour le démarrage de l'aviation de montagne au Népal

Au fil des années Air Alpes va absorber, Air Limousin, Pyrénair, Air Champagne Ardennes, Air Rouergue.

En 1974 Air Alpes introduit les premiers JET sur le réseau Régional, la CORVETTE fabriquée par Aérospatiale.

Puis en 1975 le F27 de cinquante places.

En 1978 la restructuration se poursuit et Air Alpes sera regroupée à TAT

Que reste-t-il ? Cette question m'a été posée et je peux lui apporter trois réponses :

- La première factuelle, l'aviation régionale dont nous avons été les pionniers est aujourd'hui, sous d'autres formes, sans doute, en plein développement et rend un service indispensable.

- La deuxième conceptuelle : les hommes et les femmes qui ont vécu cette aventure et l'ont construite ont été heureux d'y participer et c'est bien l'un des rôles essentiels de l'entreprise que de contribuer à l'épanouissement de ses acteurs.

- La troisième philosophique: nous devons regarder avec modestie notre action humaine dans son caractère nécessairement éphémère.

Pour conclure, vous m'en voudriez de ne pas citer trois personnes qui méritent plus que tout autres de participer à cette fête.

Mon père, Henri, homme magnifique, Polytechnique, Supaero, pilote et ingénieur d'essais, avant guerre - Rejoint Londres - Chef d'état Major du Général Koëning et à ce titre patron des forces françaises de l' intérieures - Nommé Directeur Général d'Air France, en ruine, en fait en cinq ans l'une des premières compagnies aériennes mondiales - Avec Sylvain Floirat redresse Breguet Aviation au bord de la faillite.

- Sur ordre du Gouvernement reprend Sud Aviation, Nord Aviation et la Sereb, pour faire l'Aérospatiale - Contre vents et marées lance AIRBUS Industrie avec les résultats que l'on connaît aujourd'hui – et au milieu de tout cela, passionné de montagne, membre du GHM (Groupe de Haute Montagne) - merveilleux père et amis et grand Chrétien à la foi ardente.

Ma mère, marseillaise, porte le pantalon, chose rare à son époque, et grimpe dans les calanques, parcours les sommets de l'Oisans, assume seule ses enfants durant la guerre et participe au maquis du Vercors, elle recevra la croix de guerre, une femme de soleil, force et lumière.

Tous deux furent de passionnés supporters d'Air Alpes.

Et, enfin, celle qui, tout au long de cette magnifique aventure fut auprès de tous avec force et douceur, discrétion, compréhension, ne disant jamais un mot de mal sur quiconque, rassurant, apaisant mais aussi partageant avec enthousiasme les joies, vous avez reconnus Martine.

Elle vit dans le cœur de ceux qui l'aiment.

mercredi 9 janvier 2008